De l'espace de la page blanche à l'espace du vide intersidéral, en passant par l'espace urbain,
Georges Perec examine son rapport à l'espace dans toutes ses dimensions. Dans ce texte,
la forme romanesque est mise de côté. Cela ne nuit nullement.
Extraits
Observer la rue, de temps en temps, peut-être
avec un souci un peu systématique.
S'appliquer. Prendre son temps.
[...]
Il faut y aller plus doucement, presque bêtement.
Se forcer à écrire ce qui n'a pas d'intérêt,
ce qui est le plus évident, le plus commun, le plus terne.
[...]
S'obliger à voir plus platement.
[...]
Beauté des femmes.
La mode est aux talons trop hauts.
[...]
Il ne se passe rien en somme.
Continuer.
[...]
Faire pleuvoir des pluies diluviennes, tout casser,
faire pousser de l'herbe, remplacer les gens par des vaches,
voir apparaître, au croisement de la rue du Bac
et du boulevard Saint-Germain, dépassant de
cent mètres les toits des immeubles, King-Kong
ou la souris fortifiée de Tex Avery.
[...]
En dessous, juste en dessous, ressusciter l'éocène :
le calcaire à meulières, les marnes et les caillasses,
le gypse, le calcaire lacustre de Saint-Ouen,
les sables de Beauchamp, le calcaire grossier,
les sables et les lignites du Soissonnais, l'argile
plastique, la craie.
BObook aime visualiser l'éocène* !
Espèces d'espaces
Georges Perec, Galilée
Première parution en 1974
Collection L'espace critique
Dessin de Saül Steinberg,
paru dans The Art of Living
(Londres, Hamish Hamilton, 1952)
*Éocène, du grec eos, aube et kainos, nouveau.
L'éocène est la deuxième époque du Paléogène,
et la deuxième ère Cénozoïque. Il suit le Paléocène
et précède l'Oligocène.
Il s'étend d'il y a 55,8 +/- 0,2 à 33,9 +/- 0,1 millions d'années.
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